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Paul Eluard

Er zijn woorden die doen leven

Elle est debout sur mes paupières

Dit de la Force et de l'Amour

Confections I - XXX

Une Leçon de Morale - alles kan ten goede worden gekeerd

Le phénix  - de feniks

Liberté

 

Er zijn woorden die doen leven

en dat zijn onschuldige woorden.

Het woord warmte, het woord vertrouwen,

liefde, rechtvaardigheid,

en het woord vrijheid,

het woord kind

en het woord vriendelijkheid.

En bepaalde bloemennamen

en bepaalde vruchtennamen.

Het woord moed en het woord ontdekken.

En het woord broer en het woord kameraad

en bepaalde namen van landen en van dorpen

en bepaalde namen van vrouwen, mannen

en vrienden...

                                               

Elle est debout sur mes paupières
Et ses cheveux sont dans les miens,
Elle a la forme de mes mains,
Elle a la couleur de mes yeux,
Elle s'engloutit dans mon ombre
Comme une pierre sur le ciel.

Elle a toujours les yeux ouverts
Et ne me laisse pas dormir.
Ses rêves en pleine lumière
Font s'évaporer les soleils
Me font rire, pleurer et rire,
Parler sans avoir rien à dire.

Elle est debout sur mes paupières
Et ses cheveux sont dans les miens,
Elle a la forme de mes mains,
Elle a la couleur de mes yeux,
Elle s'engloutit dans mon ombre
Comme une pierre sur le ciel.

Elle a toujours les yeux ouverts
Et ne me laisse pas dormir.
Ses rêves en pleine lumière
Font s'évaporer les soleils
Me font rire, pleurer et rire,
Parler sans avoir rien à dire.

 Dit de la Force et de l'Amour

Entre tous mes tourments entre la mort et moi
Entre mon désespoir et la raison de vivre
Il y a l'injustice et ce malheur des hommes
Que je ne peux admettre il y a ma colère

Il y a les maquis couleur de sang d'Espagne
Il y a les maquis couleur du ciel de Grèce
Le pain le sang le ciel et le droit à l'espoir
Pour tous les innocents qui haïssent le mal

La lumière toujours est tout près de s'éteindre
La vie toujours s'apprête à devenir fumier
Mais le printemps renaît qui n'en a pas fini
Un bourgeon sort du noir et la chaleur s'installe

Et la chaleur aura raison des égoïstes
Leurs sens atrophiés n'y résisteront pas
J'entends le feu parler en riant de tiédeur
J'entends un homme dire qu'il n'a pas souffert

Toi qui fus de ma chair la conscience sensible
Toi que j'aime à jamais toi qui m'as inventé
Tu ne supportais pas l'oppression ni l'injure
Tu chantais en rêvant le bonheur sur la terre
Tu rêvais d'être libre et je te continue.

C'est la douce loi des hommes
Du raisin ils font du vin
Du charbon ils font du feu
Des baisers ils font des hommes

C'est la dure loi des hommes
Se garder intact malgré
Les guerres et la misère
Malgré les dangers de mort

C'est la chaude loi des hommes
De changer l'eau en lumière
Le rêve en réalité
Et les ennemis en frères

Une loi vieille et nouvelle
Qui va se perfectionnant
Du fond du coeur de l'enfant
Jusqu'à la raison suprême.

Eluard

CONFECTIONS

 

I.

 

La simplicité même écrire

Pour aujourd'hui la main est là.

 

II

 

Il est extrêmement touchant

De ne pas savoir s'exprimer

D'être trop évidemment responsable

Des erreurs d'un inconnu

Qui parle une langue étrangère

D'être au jour et dans les yeux fermés

D'un autre qui ne croit qu'a son existence.

 

Les merveilles des ténèbres à gagner

D'être invisibles mais libératrices

Tout entières dans chaque tête

Folles de solitude

Au déclin de Ia force et de Ia forme humaine

Et tout est dans Ia tête

Aussi bien Ia force mortelle que Ia forme humaine

Et tout ce qui sépare un homme de lui-même

La solitude de tous les êtres.

III

II faut voir de près

Les curieux

Quand on s'ennuie.

 

IV

La violence des vents du large

Des navires de vieux visages

Une demeure permanente

Et des armes pour se défendre

Une plage peu fréquentée

Un coup de feu un seul

Stupéfaction du père

Mort depuis longtemps.

 

V

Sans en être très fier en évitant mes yeux

Cet abandon sans découvrir un grief oublié

En évitant mes yeux il abaisse

Les verres sur ses yeux

L'animal abandonne sa proie

Sa tête remue comme une jambe

Elle avance elle recule

Elle fixe les limites du rire

Dégrafe les parterres de la dérision

Toutes les choses semblables.

 

VI

Par-dessus les chapeaux

Un régiment d'orfraies passe au galop

C'est un régiment de chaussures

Toutes les collections des fétichistes déçus

Allant au diable.

 

VII

Des cataclysmes d'or bien acquis

Et d'argent mal acquis.

 

VII

Tous ces gens mangent

lIs sont gourmands ils sont contents

Et s'ils rient ils mangent plus.

 

IX

Je dénonce un avocat je lui servirai d'accusé

Je règne a tout jamais dans un tunnel.

 

X

Alors

L 'eau naturelle

Elle se meurt près des villas

 

Le patron pourrait parIer àson fils qui se tait

Il ne parle pas tous les jours

 

Le tout valable pour vingt minutes

Et, pour quatre personnes

Vous enlève l'envie de rire

 

Le fils passe pour un ivrogne.

 

XI

Les oiseaux parfument les bois

Les rochers leurs grands lacs nocturnes.

 

XII

Gagner au jeu du profil

Qu'un oiseau reste dans ses ailes.

 

XIII

A l'abri des tempêtes une vague fume dans le soir .

 

XIV

Une barre de fer rougie à blanc attise l'aubépine.

 

XV

Par leur intelligence et leur adresse

Une existence normale

 

Par leur étrange goût du risque

Un chemin mystérieux

 

A ce jeu dangereux

L 'amertume meurt à leurs pieds.

 

XVI

Pourquoi les fait-on courir

On ne les fait pas courir

L 'arrivée en avance

Le départ en retard

 

Quel chemin en arrière

Quand la lenteur s'en mêle

 

Les preuves du contraire

Et l'inutilité.

 

XVII

Une limaille d'or un trésor une flaque

De platine au fond d'une vallée abominable

Dont les habitants n'ont plus de mains

Entraîne les joueurs a sortir d'eux-mêmes.

 

XVIII

Immobile

J'habite cette épine et ma griffe se pose

Sur les seins délicieux de la misère et du crime.

 

XIX

Le salon à la langue noire lèche son maître

IL l'embaume ils tient lieu d'éternité.

 

XX

Le passage de la Bérésina par une femme rousse à grandes mamelles.

 

XXI

II la prend dans ses bras

Lueurs brillantes un instant entrevues

Aux omoplates aux épaules aux seins

Puis cachées par un nuage.

 

Elle porte la main a son cœur

Elle pâlit elle frissonne

Qui donc a crié ?

 

Mais I'autre s'il est encore vivant

On Ie retrouvera

Dans une ville inconnue.

 

XXII

Le sang coulant sur les dalles

Me fait des sandales

Sur une chaise au milieu de la rue

J'observe les petites filles créoles

Qui sortent de l'école en fumant la pipe.

 

XXIII

Par retraites il faut que Ie béguinage aille au feu.

 

XXIV

II ne faut pas voir la réalité telle que je suis.

 

XXV

Par exception la calcédoine se laisse prendre

A la féerie de la gueule des chiens.

 

XXVI

Toute la vie a coulé dans mes ride

Comme une agate pour modeler

Le plus beau des masques funèbres.

 

XXVII

Demain Ie loup fuira vers les sombres étoffes de la peur

Et d'emblée le corbeau renaîtra plus rouge que jamais

Pour orner le bâton du maître de la tribu.

 

XXVIII

Les arbres blancs les arbres noirs

Sont plus jeunes que la nature

Il faut pour retrouver ce hasard de naissance Vieillir.

 

XXIX

Soleil fatal du nombre des vivants

On ne conserve pas ton cœur..

 

XXX

Peut-il se reposer celui qui dort

II ne voit pas la nuit ne voit pas l'invisible

II a de grandes couvertures

Et des coussins de sang sur des coussins de boue

 

Sa tête est sous les toits et ses mains sont fermées

Sur les outils de la fatigue

II dort pour éprouver sa force

La honte d'être aveugle dans un si grand silence.

 

Aux rivages que la mer rejette

II ne voit pas les poses silencieuses

Du vent qui fait entrer l'homme dans ses statues

Quand il s'apaise.

 

Bonne volonté du sommeil

D'un bout à l'autre de la mort.

 

ondanks het lijden, het gevaar en de angst, ondanks alles, heb ik het begrepen, de donkere en de lichte motieven van mijn hoop uit te spreken. Of ik uitgelachen, hulpeloos, uitgeput of het zat was, altijd vertrouwde ik op de morgen. Anders had ik niet weer kunnen opduiken.

Als de laatste deugniet heb ik het onbereikbare verzonnen, het duurzame leven, het geluk. En het geluk geeft mij antwoord uit de diepte van de tijd. Het druppelen werd tot een bruisen en de regen ontsprong aan de brandende wond, en ik nam de goede schenkende aarde in bezit.

Om mij te vervolmaken, houd ik stand.

ALLES KAN TEN GOEDE WORDEN GEKEERD…

Het kwade moet ten goede worden gekeerd. En met alle middelen, anders zou alles verloren zijn. Wij keren ons tegen de moraal van de resignatie, wij zullen het lijden en de dwaling verdrijven. Want we hebben vertrouwen.

Ontkennen en vernietigen wilde ik de zwarte zon van het gebrek end ellende, de nachten, bitter als brak water, al de riolen van de duisternis en het toeval, de verdonkerde blik, de blindheid, de vernietiging, het geronnen bloed, de graven.

Was mij in het leven slechts een enkel ogenblik van hoop geschonken, zo zou ik toch nog hebben gevochten dit gevecht. Zelfs als ik zou verliezen, want anderen zullen winnen.

Alle anderen.

 

Une Leçon de Morale -  Paul Eluard

LE PHÉNIX

Je suis le dernier sur ta route

le dernier printemps la dernière neige

Le dernier combat pour ne pas mourir

 

Et nous voici plus bas et plus haut que jamais.

 

Il y a de tout dans notre bûcher

Des pommes de pin des sarments

Mais aussi des fleurs plus fortes que l'eau

 

De la boue et de la rosée.

 

La flamme est sous nos pieds la flamme nous couronne

À nos pieds des insectes des oiseaux des hommes

Vont s'envoler

 

Ceux qui volent vont se poser.

 

Le ciel est clair la terre est sombre

Mais la fumée s'en va au ciel

Le ciel a perdu tous ses feux

 

La flamme est restée sur la terre.

 

la flamme est la nuée do cœur

Et toutes les branches du sang

Elle chante notre air

 

Elle dissipe la buée de notre hiver.

Nocturne et en horreur a flambé le chagrin

Les cendres ont fleuri en joie et en beauté

Nous tournons toujours le dos au couchant

Tout a la couleur de l’aurore.

FENIKS

 

Ik ben de laatste op je weg

De laatste lente de laatste sneeuw

Het laatste gevecht om niet te sterven

En wij hier lager en hoger dan ooit.

Er ligt van alles op onze brandstapel

Pijnappels wijnstokken

Maar ook bloemen sterker dan water

 

Modder en dauw.

De vlam is onder onze voeten de vlam is onze kroon

Insecten vogels mensen aan onze voeten

Slaan op de vlucht

 

Wie vIiegen zullen neerstrijken.

De lucht is helder de aarde duister

Maar de rook stijgt ten hemel

De hemel is al zijn vuren kwijt

De vlam is op aarde gebleven.

 

De vlam is de wolk van het hart

En alle takken van het bloed

Zij zingt ons lied

Zij verjaagt de wasem van onze winter.

 

Nachtelijk en angstig heeft het verdriet gebrand

De as heeft in vreugde en schoonheid gebloeid

Wij keren nog steeds de rug naar zonsondergang

Alles heeft de kleur van de dageraad.

 

Vert.: Th.Festen

Liberté    


Sur mes cahiers d'écolier 
Sur mon pupître et les arbres 
Sur le sable sur la neige 
J'écris ton nom 
    
Sur toutes les pages lues 
Sur toutes les pages blanches 
Pierre sang papier ou cendre 
J'écris ton nom 
    
Sur les images dorées 
Sur les armes des guerriers 
Sur la couronne des rois 
J'écris ton nom 
    
Sur la jungle et le désert 
Sur les nids sur les genêts 
Sur l'écho de mon enfance 
J'écris ton nom 
    
Sur les merveilles des nuits 
Sur le pain blanc des journées   
Sur les saisons fiancées   
J'écris ton nom 
    
Sur tous mes chiffons d'azur 
Sur l'étang soleil moisi 
Sur le lac lune vivante 
J'écris ton nom 
    
Sur les champs sur l'horizon 
Sur les ailes des oiseaux 
Et sur le moulin des ombres 
J'écris ton nom 
    
Sur chaque bouffée d'aurore 
Sur la mer sur les bateaux 
Sur la montagne démente 
J'écris ton nom 
    
Sur la mousse des nuages 
Sur les sueurs de l'orage 
Sur la pluie épaisse et fade 
J'écris ton nom 
    
Sur les formes scintillantes 
Sur les cloches des couleurs 
Sur la vérité physique 

J'écris ton nom 
    
Sur les sentiers éveillés 
Sur les routes déployées 
Sur les places qui débordent 
J'écris ton nom 
    
Sur la lampe qui s'allume 
Sur la lampe qui s'éteint 
Sur mes maisons réunies 
J'écris ton nom 
    
Sur le fruit coupé en deux 
Du miroir et de ma chambre 
Sur mon lit coquille vide 
J'écris ton nom 
    
Sur mon chien gourmand et tendre 
Sur ses oreilles dressées 
Sur sa patte maladroite 
J'écris ton nom 
    
Sur le tremplin de ma porte 
Sur les objets familiers 
Sur le flot du feu béni 
J'écris ton nom 
    
Sur toute chair accordée 
Sur le front de mes amis 
Sur chaque main qui se tend 
J'écris ton nom 
    
Sur la vitre des surprises 
Sur les lèvres attentives 
Bien au-dessus du silence 
J'écris ton nom 
    
Sur mes refuges détruits 
Sur mes phares écroulés 
Sur les murs de mon ennui 
J'écris ton nom 
    
Sur l'absence sans désirs 
Sur la solitude nue 
Sur les marches de la mort 
J'écris ton nom 
    
Sur la santé revenue 

Sur le risque disparu 
Sur l'espoir sans souvenirs 
J'écris ton nom 
    
Et par le pouvoir d'un mot 
Je recommence ma vie 
Je suis né pour te connaître 
Pour te nommer 
    
Liberté.

Freiheit    


Auf meine Schulhefte 
Auf mein Pult und die Bäume 
Auf den Sand auf den Schnee 
Schreib ich deinen Namen 
    
Auf alle gelesenen Seiten 
Auf alle leeren Seiten 
Stein Blut Papier oder Asche 
Schreib ich deinen Namen 
    
Auf die Heiligenbilder 
Auf die Waffen der Krieger 
Auf die Krone der Könige 
Schreib ich deinen Namen 
    
Auf den Dschungel und die Wüste 
Auf die Nester auf die Ginsterbüsche 
Auf das Echo meiner Kindheit 
Schreib ich deinen Namen 
    
Auf die Wunder der Nächte 
Auf das Weißbrot der Tage 
Auf die verlobten Gezeiten 
Schreib ich deinen Namen 
    
Auf all meine Fetzen Himmelblau 
Auf den schimmligen Sonnenteich 
Auf den frischen Mondsee 
Schreib ich deinen Namen 
    
Auf die Felder auf den Horizont 
Auf die Schwingen der Vögel 
Und auf die Mühle der Schatten 
Schreib ich deinen Namen 
    
Auf jeden Hauch Morgenrot 
Auf das Meer auf die Schiffe 
Auf das wahnsinnige Gebirge 
Schreib ich deinen Namen 
    
Auf das Moos der Wolken 
Auf den Schweiß der Stürme 
Auf den dichten faden Regen 
Schreib ich deinen Namen 
    
Auf die funkelnden Formen 
Auf die Glocken der Farben 
Auf die physische Wahrheit 

Schreib ich deinen Namen 
    
Auf die munteren Pfade 
Auf die entfalteten Straßen 
Auf die überquellenden Plätze 
Schreib ich deinen Namen 
    
Auf die Lampe die angeht 
Auf die Lampe die ausgeht 
Auf meine vereinten Häuser 
Schreib ich deinen Namen 
    
Auf die halbierte Frucht 
Des Spiegels und meiner Kammer 
Auf meines Bettes leere Muschel 
Schreib ich deinen Namen 
    
Auf meinen gefräßigen und sanften Hund 
Auf seine gespitzten Ohren 
Auf seine täppische Pfote 
Schreib ich deinen Namen 
    
Auf das Sprungbrett meiner Tür 
Auf die häuslichen Dinge 
Auf das Wallen gesegneter Glut 
Schreib ich deinen Namen 
    
Auf jeden sich schenkenden Leib 
Auf die Stirn meiner Freunde 
Auf jede gereichte Hand 
Schreib ich deinen Namen 
    
Auf das Fenster des Verwunderns 
Auf die erwartenden Lippen 
Hoch über das Schweigen 
Schreib ich deinen Namen 
    
Auf meine zerstörten Zufluchten 
Auf meine zerfallenen Leuchttürme 
Auf die Mauern meines Leids 
Schreib ich deinen Namen 
    
Auf die wunschlose Trance 
Auf die nackte Einsamkeit 
Auf die Wanderungen des Todes 
Schreib ich deinen Namen 
    
Auf die zurückgekehrte Gesundheit 
Auf die entschwundene Gefahr 
Auf die Hoffnung ohne Erinnerung 

Schreib ich deinen Namen 
    
Und durch die Macht eines Wortes 
Beginn ich mein Leben neu 
Ich bin geboren dich zu kennen 
Dich zu nennen 
    
Freiheit.

 

canandanann 08-09-03

 

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